Le prix des abonnements fibre plus élevé en campagne qu’en ville ? Orange n’écarte pas l’idée

Les opérateurs vont-ils faire payer les abonnements fibre plus cher à leurs clients qui vivent à la campagne qu'à ceux qui résident en ville ? La maintenance des réseaux ruraux coûte cher, alors qu'ils profitent à peu d'utilisateurs. La situation devient intenable, selon les principaux acteurs.

fibre optique deploiement
Crédits : 123RF

Faut-il craindre une dégradation des réseaux fibre dans les milieux ruraux, ou une augmentation de prix des forfaits pour les clients qui vivent dans les campagnes ? Les subventions publiques ont permis le développement du très haut débit dans les territoires reculés, mais leur exploitation et leur maintenance pose bien des problèmes aux gestionnaires de ces réseaux.

La majorité des 85 réseaux d’initiative publique (RIP), mis en place par les départements dans le cadre du plan national de déploiement de la fibre optique, tirent la sonnette d'alarme, rapporte Le Monde. Ils décrivent une situation financière précaire et font savoir qu'il va falloir faire des choix dans les prochaines années pour les zones peu peuplées, qui ne peuvent pas être rentables et représentent des investissements très importants en comparaison avec la population qui en bénéficie.

La maintenance du réseau fibre coûte trop cher en milieu rural

Le média prend l'exemple de Navilly, un village de 435 habitants en Saône-et-Loire. En septembre dernier, des travaux qui ont coûté entre 9 000 euros et 10 000 euros ont permis de raccorder… seulement deux maisons au réseau fibre. Une installation complexe, car il a fallu faire passer les câbles de l’autre côté d'un tunnel ferroviaire.

Dans un rapport, la Cour des comptes fait savoir que 75 % des RIP ont “observé des surcoûts liés à l’exploitation des réseaux”. Les dépenses s'envolent, ces réseaux nécessitant des interventions de réparation et de maintenance complexes. “Les lignes de fibre s’étendent, en moyenne, sur 1 kilomètre pour parvenir au client”, explique par exemple Michel Chanel, vice-président du Syndicat intercommunal d’énergie et d’e-communication de l’Ain, en charge de la gestion du réseau fibre du département.

Il craint qu'à partir de 2027, les budgets alloués ne soient plus suffisants pour assurer une prise en charge systématique en cas de dysfonctionnement du réseau. Il explique qu'il faudra alors “restreindre la maintenance, qui entraînera une forte dégradation du réseau”. Si c'est le cas, on risque d'entrer dans une spirale négative. Les clients résilieront leurs abonnements fibre pour se tourner vers les solutions comme la 5G ou le satellite.

Plus tôt cette année, Thibaut Simonin, le président de Charente Numérique, admettait être “passé tout près de la cessation de paiement”. Il estimait ne pas être en mesure de tenir encore trois ans dans ces conditions, et n'était même pas sûr de pouvoir boucler un budget pour 2026.

Des abonnements fibre plus chers pour financer la maintenance ?

Les collectivités locales sont rejointes par les opérateurs d’infrastructures, qui disent aussi souffrir de la situation. Arnaud Van Troyen, le directeur général d’Altitude Infra, un opérateur d'infrastructure, dénonce des raccordements de mauvaise qualité pour les abonnés, causés par le passage de sous-traitants sous-payés. Les intempéries et phénomènes climatiques provoquent aussi des dégâts, qui sont très coûteux à réparer.

Les RIP envisagent donc de négocier de meilleures conditions financières auprès des quatre grands FAI, Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free, qui ont recours aux infrastructures dont ils ont la charge. Une ligne de fibre est actuellement louée environ 5 euros par mois, un tarif recommandé par l'Arcep en 2015, et qui n'a pas évolué depuis. Les RIP ne peuvent pas augmenter leurs prix comme bon leur semble, sous peine de perdre leurs précieuses subventions. Ils demandent donc à l'Arcep de revoir les conditions qui leur ont été imposées, un processus qui a été enclenché cet été.

L'augmentation des tarifs de gros de la fibre, tant attendue par les opérateurs d'infrastructure, sont par contre la hantise des FAI. Ombeline Bartin, directrice des relations extérieures d’Iliad (la maison mère de Free), refuse de renégocier les prix. Elle estime que s'il peut exister quelques problèmes localement, “les difficultés financières des réseaux ruraux ne sont pas objectivées”.

Du côté d'Orange, la situation est complexe. Sa filiale Orange Concessions gère 4,6 millions de lignes en fibre optique pour les collectivités territoriales et souhaite “une augmentation maîtrisée” des tarifs de gros de la fibre. La division commerciale d'Orange, celle qui vend des abonnements aux clients, ne veut pas en entendre parler. “Si les coûts des opérateurs augmentaient, il serait difficile de ne pas les répercuter sur les prix de vente aux clients”, déclare le FAI. Les prix des forfaits fibre pourraient alors varier selon la situation géographique des consommateurs, avec des abonnements plus chers à la campagne qu'en ville.


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